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dimanche 11 octobre 2015

Deux critiques de Heiraten sur le site Babelio.com

Dourvarc'h nous partage ces critiques littéraires de Heiraten (Noces) parues sur le site babelio.com


Par LydiaB, le 26 septembre 2015


Je viens tout juste de refermer ce livre et j'en reste sans voix. J'avais déjà été charmée par Grand Large, roman sur les affres de la vie dans lequel l'auteur arrivait comme par magie à insérer une prose poétique de toute beauté... Mais là, nous sommes dans une autre dimension. Si je vous dis "Kafka", vous me répondez La Métamorphose, le Procès ou le Château. Mais Dourvac'h, lui, vous dira instantanément : "Julie". Julie ? Une des oeuvres inconnues de Kafka ? On pourrait presque le voir ainsi. Mais il s'agit en réalité de Julie Wohryzek, une de ses fiancées. Vous l'aurez compris, nous avons là un texte nous relatant la relation entre les deux amoureux ; une relation sur fond de tuberculose puisque la rencontre des tourtereaux s'est faite au sanatorium.

En s'immisçant ainsi dans les pensées de l'écrivain, l'auteur met en relief tout ce qui le rongeait : la maladie tout d'abord, sa première maîtresse, l'amour passionné pour Julie et... l'amour pour les femmes. Nous faisons face à un être torturé. Qu'en aurait-il été si le mal qui phagocytait ses poumons n'avait pas été là ? Si les parents de Julie avaient bien voulu de ce mariage ? Si Milena n'était pas venue le détourner de son chemin ? Autant de questions qui restent en suspens...Je persiste et je signe, l'écriture de Dourvac'h est magnifique, travaillée, d'une richesse confinant au sublime. Il y aura désormais, lorsque je lirai du Kafka, cet écrit magistral en filigrane... Un "avant" et un "après" Heiraten.

Chapeau bas à cet écrivain qui joue dans la cour des grands ainsi qu'à son éditeur, Michel Chevalier, des Editions Stellamaris, pour avoir eu le courage de publier un livre loin de toutes les sirènes commerciales. Et j'ajoute que celui-ci rend d'autant plus hommage à cette pépite littéraire qu'il est richement illustré sur papier glacé.

LydiaB

Par Nadejda, le 03 octobre 2015


Poussez la grille de la pension d’Olga Stüdl à Schelesen où Kafka « le choucas » et Julie « la grive musicienne » vont se retrouver loin de Prague. Vous ne le regretterez pas.

Cela commence ainsi :

« Poussant la lourde grille de la pension : comme j’aime son joli grincement ! Un chant dans la neige.
Si près des yeux, sa double rangée de flèches. Écailles de métal peint sous la pulpe des doigts — rouille émeraude qu’on aime caresser longtemps comme le dos d’un lézard immobile. Est-elle déjà là ?
Pas un mouvement aux rideaux.

Pas encore rentrée… »

et se poursuit tout en délicatesse,

« Visage fragment de lune dont j’admirais le profil.

Cou fléchi de jeune cygne malade.»

tout en effleurements poétiques pour approcher « l’éternel fiancé » et Julie femme enfant, fantasque, joueuse, mutine qui va lui offrir son rire auquel le sien fera un temps écho pour tenter de couvrir le monde angoissant qui est le sien.

Mais il faudra revenir à Prague où règne le père … Prague, où Milena va faire son apparition.

« Si je pouvais - pas après pas - rejoindre ton bonheur de vivre… l’approcher pour m’installer à son côté sans l’effaroucher. Sans laisser deviner combien il me réchauffe… L’ombre des pères glisserait alors loin de nous deux. Lentement s’éloignerait dans les ruelles. L’ombre des ruelles ne tient-elle pas de cette ombre-là ? Elle nous laisserait enfin. Nous irions bras dessus, bras dessous. Nous gagnerons le soleil, la place un instant illuminée. Feux de bengale au crépuscule, qu’un forain laisse échapper de sa main » p 66

Et revient aussi le souvenir d’une autre petite fiancée, papillon éphémère qui lui aura, elle-aussi, servi à soutenir et faire renaître sa fièvre créatrice.

Gerti à Riva :

« Maintenant assise face à moi, son petit chapeau posé un peu de travers - en se donnant des airs graves. J’ai bien envie de rire mais son regard obstiné d’enfant me fait me reprendre. Je redresse mon menton qui s’appuyait sur un faux col immaculé pour la regarder au fond de l’âme.Une enfant si confiante, profonde, à l’imaginaire si vaste. » p 104.

Ce petit livre jalonné de photos anciennes au charme suranné donne vie à des êtres que l’on pourrait croire sortis d’un album familial et ainsi nous les rend très proches. Et leur belle évocation poétique où s’intègrent des extraits de la correspondance de Kafka et de son journal vient renforcer cette impression de partager leurs rêves, leurs angoisses et leur intimité.

Nadejda

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